COVID 19 : pourquoi tant de panique? Réflexion de fond…

Cet article est un extrait de mon livre « Face au monde d’après », publié en ce mois de juillet 2020, un livre sur les conséquences prévisibles de la crise du COVID 19 sur les dix ans à venir.

La grippe espagnole a fait entre 20 à 50 millions de morts selon l’Institut Pasteur, et peut-être jusqu’à 100 millions selon certaines réévaluations récentes. Pour une humanité qui comptait alors quelque 1.8 milliard d’âmes. Le fait de ne pas avoir de chiffre précis, montre à quel point cette pandémie avait été prise au sérieux !

Un siècle après, le COVID 19 ou Coronavirus, son nom plus générique, a déclenché le plus grand mouvement de panique de nos sociétés depuis la seconde guerre mondiale, et probablement désormais la plus grande crise économique depuis celle des années 1930.

Pourquoi?

En un siècle, la société a évolué. Les mentalités ont radicalement changé, la vie humaine n’a plus le même prix qu’il y a un siècle : aujourd’hui, dans les représentations sociales, c’est à dire les manières de percevoir collectivement quelque chose, la vie d’un être humain est devenue sacrée. Du moins dans notre culture occidentale. Ce qui n’était pas le cas il y a un siècle.

On peut relier cela au fait qu’il n’y ait pas eu de guerres sur nos territoires depuis près de 80 ans. Ainsi, près de 90% des européens vivants n’ont pas connu la guerre.

On peut également expliquer ce phénomène par la croissance économique des trente glorieuses, qui a conduit à une hausse très forte du niveau de vie, à une baisse de la natalité et donc à un soin beaucoup plus attentif porté aux enfants. On fait moins d’enfants, l’enfant devient une denrée rare, donc précieuse… On investit beaucoup de temps, d’argent, d’énergie, d’affect, d’amour dans des vies humaines, bien plus qu’autrefois où les buts principaux de l’enfantement étaient de servir la Nation, de « prendre la relève », de travailler, etc.

Un autre phénomène concerne les croyances religieuses, qui, dans ces mêmes sociétés, se sont amenuisées : le mystique a moins de place, et la rationalité, corollaire de la science, a pris cette place occupée autrefois par la religion. Notre société a arbitré, peut-être trop vite, entre croyance et connaissance. On est passés en quelques décennies d’une croyance avec peu de connaissance à une vénération de la connaissance en abandonnant largement la croyance.

Ce phénomène s’observe surtout sur les cinq dernières décennies. Même aux Etats-Unis, où la religion reste bien plus prégnante qu’en France, le pourcentage des personnes sans religion a été multiplié par près de 5 sur les 50 dernières années !

En France, si on prend le cas de la Bretagne, une région truffée d’églises, le nombre de prêtres a baissé de 77% en 58 ans, passant de 5037 à 1168 entre 1961 et 2018.

Les religions transmettent à leurs fidèles la perspective d’un « après-vie », ce que la science n’est pas (encore?) capable de faire. De ce fait, l’abandon de la croyance pour la connaissance, le règne de la science érigée en dogme, prive toute une partie de la population de croire en un au-delà. Le scientisme (philosophie selon laquelle la connaissance ne peut être atteinte que par la science) est devenu sous-jacent à nos représentations de la connaissance.

On peut penser, en France surtout, que les citoyens qui se disent catholiques, adhèrent plus à un esprit de perpétuation des traditions (baptêmes, mariages, etc) qu’à une réelle spiritualité. A l’occasion de la fête de la Toussaint 2019, l’IFOP a réalisé un sondage exclusif pour Atlantico, sur les croyances et les représentations de l’au-delà pour les Français. Il en ressort des chiffres surprenants : 14% des Français -seulement- estiment que l’âme humaine est immortelle. Comme le conclut Atlantico : « Nous avons donc bien la confirmation et l’amplification d’une croyance ou d’une représentation qui était déjà présente il y a vingt et qui se renforce ici : une majorité des Français estiment que la mort est finale ».

La vie à tout prix !

Cette représentation d’une mort qui met un point final à ce que nous sommes, à notre conscience, notre esprit, a généré au fil du temps une peur collective de la mort. Peur amplifiée par le fait que les générations qui peuplent les pays occidentaux n’ont pas connu de grande guerre, ni même de vraie guerre sur leur sol. Ce qui n’est pas le cas des pays du sud.

Notre seuil de peur, en particulier de la mort, est devenu de plus en plus bas. Et le devient d’autant plus que l’espérance de vie atteint désormais un plateau alors que depuis un siècle elle n’a fait que croitre.

Cette peur collective est devenue telle que nos sociétés s’acharnent à garder en vie des personnes dans le coma depuis des années. L’euthanasie est interdite, parfois même après des supplications de la famille des personnes concernées. La peine de mort pour les pires meurtriers a été abolie il y a 40 ans. Même la vie de ces derniers doit être préservée. C’est la vie à tout prix ! Et cette vie, en Europe, en France surtout, se doit d’être protégée et garantie par l’Etat, selon la tradition fortement étatique, interventionniste et jacobine de notre pays.

L’Homme occidental contemporain ne veut plus penser sa mort, sa finitude, qui l’effraye. C’est donc une fois de plus « la vie à tout prix » ! Et, accessoirement, la quête d’une bonne santé afin de profiter à fond de la période que nous avons à vivre, la volonté de prolonger la vie le plus longtemps possible…

Voilà donc les nouvelles valeurs dominantes de nos sociétés. Ou du moins d’une partie de ces sociétés.

Jean-David HADDAD

Face au monde d’après