Propos sur les couvertures et les quatrièmes de couvertures de vos romans. YLR.

Propos sur les couvertures et les quatrièmes de couvertures de vos romans.

La plus grande difficulté, quand on se trouve à ma place et dans ma position, à gérer des collections que l’on a imaginées de A à Z avec un partenaire aussi passionné que votre éditeur, avec les précieux conseils de notre équipe éditoriale, c’est vous : les auteur(e)s !

On touche, on tripote, on juge et on soupèse votre enfant.

Pire, on le transforme !

Parfois, nous allons jusqu’à changer son nom !

On l’habille avec une mise en page que parfois vous ne comprenez pas (les Magnitudes par exemple), mais qui répond aux critères de sélections des concours ou autres prix littéraires. Que vous réclamez ardemment de vos vœux. J’écris une quatrième qui, si dans un premier temps vous plaît, vous soulage de ce difficile exercice, soulève en vous dans un second temps, un questionnement, des hésitations et parfois même une angoisse palpable. Même dans vos sincères félicitations et jusque dans votre enthousiasme, je sens l’angoisse du parent inquiet pour sa progéniture.

Je la reconnais, je suis auteur aussi.

Le paradoxe étant que vous confiez votre enfant à des professionnels et que vous doutez de ces mêmes professionnels dans les étapes de fabrications de votre livre. L’édition communautaire comme nous la pratiquons, fais que vous pouvez intervenir, là où dans d’autres maisons d’édition, vous ne pourriez pas. Donc de ces dialogues, naissent aussi des conflits.

Ou pas, heureusement.

Pour au final, arriver à votre livre, fini, classé et étiqueté,  qui ne vous appartient plus, puisque dès lors, comme pour tout artiste en tout art, c’est le lecteur, le spectateur, le diffuseur qui se l’approprient.

La rédaction des quatrièmes, avec ou sans mise en abîme littéraire, fait aussi partie de la couverture, et beaucoup ont tendance à l’oublier, s’ajoute aussi la tranche du livre et le nom de la collection ainsi que son logo.

Ces 5 éléments sont le corps du livre et son âme c’est le texte.

Votre texte.

Votre texte que nous avons lu, sélectionné, adopté et pour quelques-uns et quelques-unes d’entre vous, oserais-je le dire d’un point de vue personnel, aimer. Presque amoureusement. À cette étape, votre enfant a déjà grandi. Il a une relation avec un tiers que vous ne maîtrisez pas. Il s’envole. Il quitte le nid. Il devient grand.

La vision que nous pouvons en avoir, que j’en ai, que les lecteurs en auront vous échappe totalement. Vous passez derrière le comptoir, vous n’êtes plus serveur, mais consommateur de votre œuvre. Et vous êtes perdus. Ces regards extérieurs, cet habillage spécifique pour la grand-messe de la parution, cette pression, cette attente qui l’accompagne, cette impatiente que vous avez, cette promotion que vous entamez (pour beaucoup avant l’heure), tout cela fait que votre enfant chéri vivra sa vie sans forcément vous rendre des comptes et sans que ses parrains et marraines contrôlent tout ça mieux que vous, d’ailleurs. J’ai lu, d’un auteur, une idée que j’ai aimée. C’est celle-ci : « chaque livre à un destin qui lui est propre. »

En moins d’un an, j’ai réalisé graphiquement  18 couvertures pour les auteur(e)s de la maison et une trentaine d’illustrations, souvent à leurs demandes, souvent parce que la production ne pouvait pas animer l’idée retenue en concertation avec l’auteur, avec l’utilisation d’un photomontage classique, malgré le talent de Cynthia, la directrice de production. Toujours parce que le sujet était de l’ordre des arts plastiques et quelques rares fois, parce qu’il s’agissait d’un véritable coup de cœur pour le texte avec qui l’évidence graphique était née instantanément. J’ai évidemment, et ce pour les deux tiers des livres publiés sur le pôle littéraire, participé à l’élaboration des autres couvertures, soit par un schéma, soit par une orientation thématique et toujours en discussion avec vous comme  avec la production.

En interne, l’éditeur qui est avant tout un chef d’entreprise a souvent rugi du temps passé à l’élaboration de ces couvertures, pour moi comme pour la production. Il dit : « 20 heures de travail sur une couverture, c’est beaucoup trop ! »

Et il a raison, c’est contre-productif.

Mais une bonne marraine, un bon parrain, veut le meilleur pour son filleul. Et bon gré, mal gré, le livre se fait. Et on est fier de chacune de vos œuvres et de l’ensemble de la production. Quant à vos quatrièmes (je suis le malfaiteur qui a écrit les deux tiers du catalogue), dites-vous qu’elles génèrent un stress tel, à chaque nouveau texte, que lorsqu’ un  de la dictature sanitaire m’annoncera que j’ai un ulcère à l’estomac, je refuserai de payer la consultation.

 

Yoann Laurent-Rouault, directeur littéraire et artistique des éditions JDH. Titulaire du Diplôme National d’Enseignement Supérieur Plastique, avec mention, section communication, avec spécialisation sur le rapport texte/image. École régionale des Beaux-arts de Rennes.

Quelques exemples de réalisations plastiques :