Bibliothèques oubliées par Alain MAUFINET

Bonjour,

Bibliothèques oubliées.

Les plus belles bibliothèques sont celles qui connaissent désordres, et abondance. On les réveille accidentellement derrière une porte ancienne. De véritables écrins de bois, d’encre et de papier se dévoilent peu à peu. Elles diffusent des ombres mystérieuses. Elles laissent filtrer les clartés du savoir pour le lecteur avide de recherches et de connaissances. Elles l’encouragent à s’isoler, à oublier, et à rêver. Des manuscrits, des revues et des brochures, parfois annotées par des mains inconnues, entourent soudainement l’aventurier d’un monde isolé. Elles l’incitent à musarder de chapitre en chapitre séduit par des romans, des essais, des portraits littéraire longtemps conservés par un bibliomane. Elles l’amènent à flâner de page en page d’une nouvelle, d’une causerie, d’une lettre seulement connues par un groupe d’initiés. Elles le capturent, pareilles aux sirènes qui séduisent le navigateur aventureux qui sillonne des flots peu fréquentés. Elles lui font miroiter un univers mystérieux où règne l’imaginaire. Le songeur, un peu artiste, un peu poète, apprend à comprendre, à frémir intensément. Il peut s’instruire sans peur, sans pression, pour l’amour du grand, et du beau. Les découvertes sont alors superbes. Entre deux miniatures finement peintes à la main, à côté d’une illustration cachée par des aquarelles, il peut repérer une œuvre originale tout entière nourrie aux premiers frémissements des valeurs de nos civilisations. Un tiroir chute, et un livre d’heure surgit. Les plus précieuses expressions artistiques du Moyen-âge peuvent sommeiller de la sorte. Pour celui qui foule de tels lieux, le temps suspend son cours. Il ne peut que demeurer des heures, bercé par des mots et des croquis. Happé par des idées originales, il dérive vers d’autres rivages.