Vivre ou survivre ? Par Cécile Ducomte.

Le Président de la République a annoncé à tous les français un nouveau confinement … Un autre confinement. Je passerai les détails des raisons qui ont exigé cette mesure, n’exerçant ni une profession dans le milieu médical, ni dans la recherche scientifique, et n’étant d’aucune compétence pour juger du bien-fondé de cette mesure de moins en moins exceptionnelle.

Mais cette fois, le confinement sera différent. En effet, il a prévu, avec l’aide de son Premier Ministre, de nous indiquer précisément ce qui est essentiel et ce qui ne l’est pas. Ce qui doit rester ouvert, et ce qui doit être fermé. Ainsi, certains pourront sortir, mais d’autres non.

Je suis une citoyenne Lambda, habitant dans le Sud Ouest de la France, où il fait généralement bon vivre. Je suis une musicienne de passion et de métier. Nous reviendrons sur cela tout à l’heure. Intriguée par cette idée, j’ai donc entrepris des recherches sur le mot « essentiel », mot qui revient assez souvent dans les discours ces temps-ci.

J’ai donc ouvert mon bon vieux Larousse, qui trône fièrement au milieu des très nombreux romans de notre bibliothèque, aussi variée qu’elle puisse l’être avec une musicienne passionnée de nature, de fantastique, un compagnon ingénieur, passionné de manga, de science (fiction et réelle), et deux étagères entières consacrées à la littérature jeunesse, que j’affectionne particulièrement et qui a fait et continue à faire le bonheur de mes trois enfants.

Voici donc ce que j’ai lu :

Essentiel, essentielle : adjectif (du bas latin essentialis, qui a trait à l’essence).

Voilà qui est intéressant. Voici maintenant sa définition.

* Qui est indispensable pour que quelque chose existe. Exemple cité pour corroborer cette noble définition : L’air est essentiel à la vie.

* Qui est d’une grande importance ; principal, capital.

Passons maintenant aux synonymes.

* constitutif, foncier, intrinsèque, vital.

Voyons à présent les antonymes, ou contraires. Attention, accrochez-vous :

* accessoire, secondaire, superflu, inutile.

Ma parenthèse du Larousse est terminée. Place à la réflexion personnelle.

Je vais donc citer ce que je pense être essentiel à la survie des êtres humains que nous sommes. La santé, la nourriture, l’eau, avoir un toit sur la tête. Pour revenir sur ce dernier point, rappelons que les Hommes préhistoriques ont commencé à se sentir protégés dans les grottes façonnées dans les roches. A partir de ce fait capital, l’humanité a passé l’essentiel de sa vie à développer l’art, les transmissions de savoirs, s’inventer des histoires, à s’unir, et à mettre au point leurs stratégies de progrès. Les premières véritables interactions sociales durables sont nées lorsqu’ils se sont enfin sentis à l’abri. L’humanité a donc, avant toute chose, entrepris la construction d’abris de fortune, naturels ou inventés avec les moyens du bord, afin d’échapper aux grands prédateurs, comme aux petits, et aux aléas météorologiques. J’ai évoqué ce sujet dans « L’appel de Clara » qui sortira prochainement aux éditions jdh.

Chaque être a besoin d’éléments vitaux pour survivre. Nous sommes tous d’accord.

J’adresse mon admiration à l’ensemble du personnel médical, qui, malgré le manque de moyens de plus en plus flagrant, est toujours au front, donnant le meilleur de lui-même, pour nous garantir le plus important de tous les points : la santé.

Les grands magasins de distribution alimentaires seront ouverts pour assurer à la population un approvisionnement en nourriture. J’adresse d’ailleurs un énorme mot d’amour à mon fils aîné, qui suit une formation de transporteur routier, et qui, lui aussi, comme tous ses collègues, sera sur le front lors de ce mois de confinement, sur les routes en l’occurrence.

Autre point déclaré essentiel : les écoles, collèges et lycées. Certains jeunes se sont retrouvés perdus et déboussolés, au printemps, avec des cours assurés à distance, par mail, et autres moyens déployés par des enseignants qui ont assuré avec beaucoup de compétence et une énergie que nous n’imaginons même pas. Un nouveau confinement serait une catastrophe pour certains de ces jeunes qui pourraient cette fois perdre pied totalement. J’entends donc cette préoccupation du gouvernement.

Passons maintenant à ce qui n’est pas essentiel. Le superflu donc, l’inutile. Eh bien c’est simple : il s’agit de tout le reste ! L’art, la littérature, le sport, les passe-temps, les loisirs qui nous sont chers, la danse, les soirées entre amis, les liens entre les gens.

Pour moi, ce n’est pas du superflu cela. Nos anciens ont besoin de visites, de se sentir aimés, soutenus, de sentir notre main dans la leur pour leur dire que nous ne les oublions pas et que nous tenons à eux. Ils semblent être, eux aussi, les grands oubliés de ce gouvernement et des victimes collatérales de mesures censées les protéger mais qui peut les faire mourir de chagrin et de solitude.

Les artistes, aussi, sont les grands perdants de ces confinements, qui semblent vouloir devenir une « norme ».

Que serait un monde sans musique ? Sans art ? Sans sport ? Sans restaurant ? Sans détente, sans activités qui nous permettent de vivre et non juste de survivre ? Est-ce ce monde-là que vous voulez offrir à vos enfants ?

Comme le disait si justement Wagner : « On peut très bien vivre sans musique, mais moins bien. »

Je vous invite à réfléchir un instant sur cette notion d’essentiel.

Hier, dans mon jardin, j’ai observé les couleurs de la nature. Qu’elle est belle sous le soleil d’octobre ! Depuis ce matin, je contacte tous mes élèves pour assurer mes cours de piano et de flûte traversière en distanciel. Ce n’est pas amusant. Pour certains élèves, c’est dur car je ne suis pas à côté d’eux pour les encourager, j’ai du mal à les corriger dans leur posture. Je serai derrière un écran, où il est toujours plus difficile de faire passer les notions sans les montrer directement. Mais nous allons y arriver. Je ne suis pas à plaindre.

Je pense avec un énorme pincement au cœur à tous mes amis intermittents du spectacle, durement éprouvés. Je pense aussi aux « petits » magasins, non indispensables, où il fait bon déambuler, dans les centre-ville. A tous les artisans qui, à la sueur de leur front, nous offrent des produits d’une qualité et d’une beauté qui valent largement tous ces produits industriels « Made in China » remplissant les grands magasins. Je pense aussi aux restaurateurs, qui doivent encore se réinventer pour ne pas disparaître ni mettre la clé sous la porte.

Pour Noël, qui arrive à grands pas, tentons de les soutenir, ce sont nos amis, nos voisins. Tentons aussi de faire travailler l’agriculture de proximité. En France, nous avons énormément de chance de bénéficier d’une variété de produits locaux exceptionnels. Potirons, citrouilles, pomme de terre, fruits et légumes de saison, riches en vitamines, produits issus de l’amour du métier et non du sacro-saint rendement. Quand on aime, on ne compte pas.

Comprenez que la vraie résistance est pacifique. Elle passera par nos choix, nos actes, nos achats, nos pensées (ne sous-estimons pas le poids de nos pensées), et notre aspiration à vivre dans un monde meilleur, où régnera pour tous la paix, la joie, le bonheur et l’harmonie. Car cela, ce n’est pas la survie mais c’est juste … la VIE.

A nous de choisir qui nous voulons nourrir : les géants, qui sont les grands gagnants de cette nouvelle misère, ou les plus humbles qui la subissent, durement impactés par ces confinements dont ils ne sont pas forcément responsables. A nous de contrer cette pensée unique dont on veut imprégner la population, en nous indiquant ce qui est bon ou pas pour nous. Pensons par nous-même et élevons notre esprit pour renvoyer de la lumière et non de l’obscurité.

Préférez-vous seulement survivre ou bien vivre ? Préférez-vous un monde déshumanisé manipulé par quelques milliardaires avides, ou un monde où chacun trouverait son bonheur, surtout dans le vivre ensemble ?

Cécile Ducomte