La Slam de Jean Guesly.

 

 

Du slam et de la poésie pure chez JDH éditions, avec notre auteur Haïtien, Jean Guesly, du talent brut et la rencontre avec un livre bouleversant pour notre équipe éditoriale. A lire, relire, comprendre, entreprendre, rêver, appréhender, chanter, déclamer, bref : à vivre.

ON ENTERRE CHAQUE JOUR UNE PARTIE DU MONDE

Resquilleur

de fausse compagnie

fais que façonne

la mémoire rectiligne

de parallèle

expression

de nul abyssal

fais que la mer

ne ravale plus la respiration

des fruits de la terre

en dimension réelle

depuis toujours

quelques extrémités

enterrent

des vies

de méconnaissance

quelques nuées

recouvrent

certaines parties du monde

de ténèbres infinies

depuis toujours

les quadratures font nombretant

de brûlures de siècles

tant de révélations avortées

combien de certitudes

qui brûlent

en ton nom

combien de

recommencements

combien de marches

combien de finitudes

inachevées en ton nom ?

NULLE VIE

Indiscernable

elle est de nulle trame

de brûlure

elle est de nul sourire

courtois

en quête de rire complice

elle est de nul cillement

présent

chez nous

débouché

par des fins

miséricordieuses

elle est de nulle tendresse

indolore

surtout contraire

qui finit

par faner des fleurs

elle est de nul verbe

de poussière

attendant les rencontres

avec son souffle

elle est de nulle luette

qui chante la vie

puis crie la mortelle est de nulle langue

qui interpelle le bonheur

puis pleurniche

en révoquant sa solitude

elle s’empare

du jour et de l’instant renouveaux

insoutenable

elle est de cause méconnaissable

elle est tentative

de savoir ce que cachent

les ténèbres

elle s’empare

d’une terre abstraite

elle s’empare

d’un vertige de nulle vie.

TISON DE RATURE

Nul endroit au monde

nulle essence universelle

soit des vapeurs

en éternelle vacance

où les saisons

ne connaissent plus

de paupières

peut-être

de la latitude colorée

dont l’élan est tourmente

exigeante

sur la rétine

pour se procurer

ainsi que

l’imprévisible

de rature éparse.

LA VIE EST UN PRÉTEXTE POUR VIVRE

En-deçà de

l’humaine conception nébuleuse

tant d’ajours

ont laissé passage poreux à l’obscurité

des siècles

elle pénètre les fibres nerveuses

combien de nos masques

s’en faudrait-il

pour calculer

surtout

les vacances de la peau

combien de nos contrariétés propices

s’en faudrait-il

pour arracher à plein mot

le saphir de l’au-delà

il faut révoquer la vie comme étant

feinte entrave

comme étant prétexte de vivre

tant que l’acte de vivre est poussière

tant que cela est

parcimonie chancelante

et accent d’esclandre

il faut onduler avec ferveur la douceur

de mourir

pour compromettre

d’autres ratures abstraites

pour explorer d’autres univers

il faut se laisser vicier

pour ne jamais être présent

et laisser maintenant de la place

à l’inhabitude.

SENS SANS SENS

Sans moindre qualification

sans des rognures de geste

pas une vie vraie

qui s’attise d’invisibilité

sans être

sans existence

sens sans sens

c’est fortement insensée

cette douce illusion

qui nous crève la vigilance

qui nous trompe

qui nous noie

qui nous tanne

de son état inexistant

qui est existence inconnue

qui ne se laisse pas tâter

plus intime

que sa silhouette pâle

plus oubliée

que sa transparence

il n’y aura jamais autant.

L’ABSENCE EST D’UNE PRÉSENCE ABSENTE

Des cellules cervicales

fument

la brûlure est que

l’absence est présente

en cicatrices

en apostrophes

en songes

au plus

en chaque instant

qui se sépare de finitude et d’infinitude.

POUR QUE SOIT LA VIE

Épithète de vie

résidu d’absence

tout n’aurait jamais pu

se définir

longuement sur l’iris

tout n’aurait jamais connu de mort

tout n’aurait jamais pu être

présent par la présence présente

au plus

tout n’aurait jamais connu

d’existence par l’existence existante

il s’en faudrait

des absences présentes

des présences absentes

il s’en faudrait

l’existence de l’existence

l’existence de l’inexistence

l’inexistence de l’inexistence

l’inexistence de l’existence

pour que soit la vie

hésitant

on a la prétention

d’une écoute inhérente

de silence dévoilé

combien de recommencement

de monde faudrait-il

pour démasquer la trame

combien de fracas d’intuition

faudrait-il

pour se ressaisir des doutes

combien d’invisible

faudrait-il

et ce presque visible

pour tâter exagérément

chaque trouble tripe

chaque rien

chaque sens d’essence

chaque silence fulgurant

pour revitaliser le vide de vie

et respirer

l’absence.

RESPIRER L’ABSENCE

Pas une allure molle

temps disparus sans fantôme

sans mot-dit

ça ne se qualifie pas

et puis les qualifications

ne feraient pas nombre

ça ne se nomme pas

seule notre

arrogante existence au monde

reflète

l’absence de sa présence

ce poème inécrit tente de cristalliser

sa transparence insaisissable

mais ça ne se voit pas

sinon quelques troubles

miroités de tentative

ça ne se sent pas

on caresse inconscient

sa propre sensation

de la parution ressentissante

du vide traversant les pores

on n’y doute

que de vague vacante

que d’espace perduré

SENS INSENSÉS

Ce des sens insensés

alors plus grands qu’essence

inquiétant des autres sens de sens

sans effet vivant

sans entendement possible

ce des sens

insensiblement éminents

dont le présent est

tendresse fulgurante

dans les brisures du mental

ce des sens nés d’absence

au contact de nul soleil

de nulle bouche folle

de nulle silhouette aimante qui pullule

de nulle nuit

et de nul jour pâles

teintés de cillement

mais d’un manque

de temps

des moments invisiblement

permanents.