Un extrait de mon recueil de pensées satiriques, Cent papiers sans pieds à paraître à la fin du mois. Aujourd’hui 14 Juin, je vous livre ma pensée numero 14 :
« L’autre jour, j’attendais mon train puis il y a eu un homme qui avait l’air salement mal en point. Il s’est penché sur la poubelle à côté de moi et en a sorti ce qu’il pouvait -selon lui- manger. Il allait partir sans rien me demander. Je l’ai interpellé et j’ai voulu lui donner ma monnaie. Je n’avais que deux ou trois euros mais il a refusé, comme si l’argent qu’il n’avait pas mérité n’avait aucune valeur à ses yeux. Je me suis sentie impuissante face à ses difficultés qui m’accablaient. Je me suis sentie sale, dégueulasse, pourrie par le Monde et les injustices sociales. J’ai passé tout mon trajet à songer à la vie qu’il menait alors que moi, jeune femme européenne, je rentrais chez moi au chaud en me plaignant des connards égoïstes de la société qui téléphonent dans les transports en commun. J’ai constaté -avec une amère amertume- que je faisais partie de ces connards égoïstes que je méprise, à force de croiser le malheur on finit par fermer les yeux et se laisser bercer par l’opulence dans laquelle on est né. Je réalise que j’ai mis des œillères à ma pauvre luxure ternie et j’ai fermé les yeux sur tous les malheureux du monde. Je me dégoûte. »