Interview de Nicolas Froissard :

Vincent Kaiser : Bonjour M. Froissard, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Nicolas Froissard : Je m’appelle Nicolas Froissard, j’ai 46 ans, j’habite à Paris. Je travaille dans l’économie sociale et solidaire depuis 22 ans en ayant rejoint un des leaders du secteur associatif : le Groupe SOS. Nous sommes des entrepreneurs de l’intérêt général. Nous développons des réponses pérennes et efficaces aux enjeux de société : lutte contre les exclusions, transition écologique, éducation, solidarité internationale… En France, nos 20 000 salariés et 15 000 bénévoles inventent l’hôpital de demain, la maison de retraite de demain, la crèche de demain… Je suis le porte-parole de cette organisation. Et, en tant que dirigeant du groupe, je participe aux décisions relatives à la conduite de l’ensemble de nos activités, plus spécifiquement j’accompagne aussi le développement de notre secteur culture et coordonne notre animation territoriale pour contribuer à ce que les équipes de nos 700 établissements se connaissent et travaillent ensemble au niveau des territoires.

Vincent Kaiser : Très bien, un parcours intéressant et complet. Vous avez étudié à l’UPEC et à Sciences Po, quels conseils donneriez-vous aux étudiants souhaitant suivre cette voie ?

Nicolas Froissard : Le droit mène à tout ! Je suis juriste de formation, j’ai fait mes 4 premières années à Rouen, la 5ème à l’université de Paris-Est Créteil effectivement. Ensuite, j’ai enchainé sur un Master de sociologie des organisations à Sciences Po. La sociologie appliquée au monde de l’entreprise : pourquoi une organisation fonctionne ou dysfonctionne ? Quels sont les enjeux et les stratégies des différents acteurs qui expliquent les bons ou les mauvais fonctionnements… Passionnant.

Mon conseil c’est de suivre sa voie. Se rapprocher le plus possible de ce qui nous plaît. Avoir cette exigence. Mais aussi une forme de bienveillance envers soi-même : accepter que parfois on doit tâtonner. Ce n’est pas facile de trouver sa voie. Pour mettre toutes les chances de son côté il faut sans doute essayer de multiplier les stages, les échanges avec des professionnels… De nombreux sites internet comme « Merci Bobby » proposent, pour s’inspirer, des témoignages de professionnels sur leur métier.

Vincent Kaiser : De très bons conseils. Vous êtes co-fondateur du « Diplôme Universitaire Entrepreneur Social », pouvez-vous nous en dire plus ?

Nicolas Froissard : Nous avons co-fondé un diplôme avec Dauphine pour permettre à des personnes de se spécialiser, en formation continue, dans l’entrepreneuriat social. Pour travailler dans le secteur associatif, dans les coopératives, dans les entreprises à impact etc. il faut d’abord être formé à un métier : juriste, comptable, communicant, chef de projet, ingénieur etc. Si on veut exercer ce métier, mais surtout si on souhaite entreprendre ou diriger dans l’économie sociale et solidaire, il est sans doute appréciable d’appréhender les spécificités de ce secteur. C’est l’objectif de cette formation.

Vincent Kaiser : Un diplôme très intéressant et très attractif. Vous êtes président de « Hacktiv » pouvez-vous nous en dire davantage ?

Nicolas Froissard : Hacktiv est une association membre du Groupe SOS. Elle vise à faciliter l’engagement citoyen. Elle développe notamment, en lien avec les collectivités, des plateformes numériques de mise en relation entre des associations et des personnes qui veulent s’engager bénévolement sur leur territoire. Hacktiv est capable de répondre aux besoins des villes pour mettre en place toute solution digitale favorisant l’implication des citoyens dans la vie publique, comme les budgets participatifs par exemple.

Vincent Kaiser : Vous disiez plus tôt que vous êtes le porte-parole et un co-dirigeant du Groupe SOS, pouvez-vous nous revenir sur la mission de ce groupe ?

Nicolas Froissard : Je dirais que c’est de lutter en France et dans le monde contre la société à deux vitesses qui se développe un peu partout dans le monde et en France aussi. Par exemple dans nos 70 maisons de retraites médicalisées, nous proposons des services de qualité qui sont accessibles à tous, qu’on ait des moyens ou pas. Lutter contre les inégalités, c’est aussi lutter contre la désertification médicale. Les 10 hôpitaux que nous avons repris et que nous gérons menaçaient de disparaître et de laisser des bassins de population sans offre de soin. Nous travaillons beaucoup sur l’accès à la culture pour tous. Avec le projet 1000 cafés, nous recréons aussi de l’activité économique et des lieux multi services (café, restaurant, épicerie, relai Poste, retrait bancaire, accès internet, dépôt de pain…) dans des villages dépourvus de commerce.

Nous repérons sur le terrain des problèmes majeurs auxquels font face nos concitoyens, des « SOS » sociétaux en quelque sorte, et nous y apportons des solutions pérennes et reproductibles.

Vincent Kaiser : Un Groupe très intéressant. Vous avez été membre de plusieurs conseils d’administration (Les canaux, Mouvement Impact France), quel est leur fonctionnement ?

Nicolas Froissard : Ce sont des associations qui promeuvent une autre économie que celle qui nous envoie dans le mur. Une économie plus respectueuse de l’humain et de la nature. Les entreprises doivent se réinventer autour de quatre piliers : impact social, impact environnemental, gouvernance davantage partagée, répartition de la richesse équitable. Je suis convaincu que celles qui ne le feront vont disparaître.

Vincent Kaiser : Un fonctionnement intéressant. Vous êtes également engagé sur le terrain auprès d’associations (Etablissement Français du Sang, Parrains par mille), en quoi consiste votre engagement ?

Je considère que l’engagement citoyen est une bonne façon de se sentir utile et finalement de réussir sa vie. Gagner de l’argent, avoir des responsabilités c’est très bien. Mais si on peut aussi faire du bien autour de soi, c’est encore mieux. Il faut redéfinir ce qu’est la réussite dans notre société. Pendant longtemps la réussite passait par le pouvoir et l’accumulation. On en voit les conséquences aujourd’hui. Consommons moins et engageons-nous davantage pour la société. C’est aussi une façon de se sentir bien dans ses baskets. Etre utile rend heureux. J’en suis convaincu.

Ainsi j’essaye de régulièrement de donner mon sang. Ca permet de sauver des vies. Et, quand on est en capacité de le faire, ce n’est pas très compliqué. Ca me fait penser que je l’ai moins fait ces derniers temps. Je m’y remets après le 20 kms de Paris en octobre ! Que je cours pour l’association Parrains Par Mille. Depuis 3 ou 4 ans, j’accompagne avec cette association un jeune réfugié dans son intégration en France. Quelques heures par mois pour lui faire passer des bons moments et pour l’aider dans ses choix professionnels. Et, je cours les 20 kms de Paris avec l’objectif de fédérer 20 nouveaux parrains ou marraines !

Vincent Kaiser : Vous avez désigné « Top Voice LinkedIn 2022 », selon vous quels sont les secrets pour bâtir une communauté ?

Nicolas Froissard : Il est nécessaire de publier régulièrement. Une communauté doit être alimentée fréquemment. Et ses membres doivent comprendre facilement sur quelles valeurs vous la bâtissez. Chez moi c’est assez simple, si vous pensez que la lutte contre les inégalités et la lutte contre le réchauffement climatique sont les enjeux de ce siècle (enfin, plutôt les deux faces de l’enjeu du siècle)… Et que tout le monde a un rôle à jouer (citoyens, entreprises, pouvoirs publics…) : Welcome !

Sur mon profil on découvre régulièrement des héroïnes et héros du quotidien avec l’initiative qu’on a lancé avec des amis pendant le 1er confinement : #DenonceTesHeros. Des personnes qui s’engagent concrètement pour rendre la vie plus agréable pour tous. Il y a tellement de personnes formidables. Ce sont elles dont on a besoin d’entendre parler.