La mort d’un grand acteur. Hommage à Gaspard Ulliel.

 

Sa carrière débute réellement en 2001, dans un rôle mineur dans « Le Pacte des loups » de Christophe Gans. En 2002, il joue le rôle d’un garçon découvrant l’amour et la sexualité qui lui vaut une nomination au César du meilleur espoir masculin, dans le film « Embrassez qui vous voudrez », de Michel Blanc. « Impressionné par ses performances », André Téchiné le choisit pour jouer avec Emmanuelle Béart dans « Les Égarés ». Il est nommé une seconde fois au César du meilleur espoir masculin. En 2004, il incarne Manech dans « Un long dimanche de fiançailles », de Jean-Pierre Jeunet, adapté du roman de Sébastien Japrisot, avec Audrey Tautou, qui lui donne le César du meilleur espoir masculin. En 2005, il tient le premier rôle dans « Le Dernier Jour », de Rodolphe Marconi, avec Nicole Garcia, Mélanie Laurent et Christophe Malavoy. En 2006, il tourne « « Jacquou le Croquant » de Laurent Boutonnat, adaptation cinématographique de la série à succès, elle-même adaptée du roman d’Eugène Le Roy. Sorti en 2007, c’est encore deux nominations aux Césars de 2008. La même année, il joue dans Hannibal Lecter : « Les Origines du mal », une coproduction internationale. En 2008, c’est aussi le tournage de « La troisième partie du monde » d’Éric Forestier, un drame fantastique avec Clémence Poésy, le formidable film «  Un barrage contre le Pacifique » avec Isabelle Huppert et enfin, « Le Premier Cercle », aux côtés de Jean Reno. Puis s’en suivent quelques films à l’international. En 2010, il revient en France avec « La Princesse de Montpensier », dont le rôle-titre est incarné par la superbe Mélanie Thierry. L’acteur y prête ses traits à Henri de Guise. Le film est acclamé par la critique. Et la liste de ses films continue, « L’Art d’aimer » d’Emmanuel Mouret, « Tu honoreras ta mère et ta mère », écrit et réalisé par Brigitte Roüan. En 2014 sort le biopic « Saint Laurent », co-écrit et réalisé par Bertrand Bonello. S’en suit « Juste la fin du monde » de Xavier Dolan, rôle qui lui offrira le César du meilleur acteur en 2017. Cette même année, il joue à nouveau avec Isabelle Huppert, dans « Eva », de Benoît Jacquot et aux côtés de Gérard Depardieu dans le film de Guillaume Nicloux « Les Confins du monde ».

Voilà pour l’essentiel de ses œuvres, mais pour ma part, c’est le jeune « bleuet », ce rôle de jeune troufion lunaire livré à la barbarie des fous et des marchands de canons dans le film « un long dimanche de fiançailles » des frères Jeunet, qui m’a bouleversé et fait suivre depuis la carrière de ce prodige du cinéma français, qui aurait pu vieillir dans une carrière mondiale similaire à un Delon ou à un Gamblin, pour la France. Pour ceux qui n’ont pas vu ce film magnifique et intense, voici le synopsis emprunté au site « allociné » :

« En 1919, Mathilde a 19 ans. Deux ans plus tôt, son fiancé Manech est parti sur le front de la Somme. Comme des millions d’autres, il est « mort au champ d’honneur ». C’est écrit noir sur blanc sur l’avis officiel. Pourtant, Mathilde refuse d’admettre cette évidence. Si Manech était mort, elle le saurait !

Elle se raccroche à son intuition comme au dernier fil ténu qui la relierait encore à son amant. Un ancien sergent a beau lui raconter que Manech est mort sur le no man’s land d’une tranchée nommée Bingo Crépuscule, en compagnie de quatre autres condamnés à mort pour mutilation volontaire ; rien n’y fait. Mathilde refuse de lâcher le fil. Elle s’y cramponne avec la foi du charbonnier et se lance dans une véritable contre-enquête. De faux espoirs en incertitudes, elle va démêler peu à peu la vérité sur le sort de Manech et de ses quatre camarades. Et retrouver Manech. »

L’interprétation du regretté Gaspard Ulliel est tout simplement magique.

Et bouleversante.

M M M.

Mathilde aime Manech. Pour ceux qui ont vu ce film, ces trois lettres sont gravées dans nos esprits. Comme cette scène inoubliable de l’effeuillage à l’allumette de Mathilde. Et encore le plan intimiste sur ces deux jeunes gens, presque encore des enfants, allongés l’un contre l’autre, lui tenant son sein et elle la main posée sur son sein. Un amour tout en délicatesse et en pudeur, qui résume tout et fait passer la guerre, cette première boucherie mondiale, pour une farce sordide. Pour une aberration sans nom. Comme la vérité nue du jeu de cet acteur dans ce film, mort prématurément à l’âge de 37 ans des suites d’un accident, était un plaidoyer pour la paix de nos enfants. Merci Monsieur Ulliel.

YLR.