La plage, par Corinne Laure Brassenx.

Corinne Laure Brassenx est une nouvelle auteure de la maison, que nous retrouverons en janvier dans un collectif de nouvelles sur le thème de l’amour, sous toutes ses formes, et avec qui nous espérons mener à bien la publication de ses nouvelles littéraire en solo.

Corinne est une auteure « coup de cœur » pour ma part,  et comme quelques auteures  et auteurs de la maison, elle fût repérée grâce à ses participations à cette revue littéraire.

YLR, rédacteur en chef et directeur littéraire et artistique de JDH éditions. 

 

 

La plage.

Lorsque ma main est inondée par la sensualité la plus authentique… Lorsque cette main frôle ton corps nu sur la plage puis se repose un instant sur ton ventre… Là, je me connecte à ce qui nous sépare et à ce qui nous unit. A la fois séparation et unisson, à la fois souffrance et harmonie, avec cette envie de te protéger du monde et de toi-même. Tant de grâce dans nos silences, tant de respect pour nos deux solitudes qui tentent de s’accorder et de se donner cet amour qui nous a tant manqué, ontologiquement. Là, nous sommes deux enfants ; un bébé couple en pleine naissance, peut être parfois maladroit, peut être trop fragilisé, face à cette source infinie qui nous traverse et nous submerge. Ce magnétisme qui émane de toi, je le reçois dans sa course folle et m’en nourris certainement. Nos grandes sensibilités sont des trésors enfouis qui se délivrent après des années de retenue. Comme une petite tortue effarouchée par l’homme, tu sors enfin ta tête et tes petites pates aux attaches si fines. D’une main moite et tremblante, je caresse la soie de tes cheveux depuis la racine jusqu’aux extrémités, en conscience de ce que je te donne, j’accompagne ton sommeil. Et tu t’endors profondément dans ce total lâché prise où j’écoute ton souffle ; la vie qui est en toi.

Puis mon regard se porte sur le creux à la base de ton cou que l’on appelle « le Bosphore ». Là, ton cœur y palpite visiblement. Cela me rassure un instant. Me reposant aussi dans cet infini présent que je vis à trois cent pour cent. Soudain, j’ai peur que tu attrapes un coup de soleil, aussi je dépose mon chemisier blanc sur ton magnifique sexe que j’aime si fortement. A ce moment là, s’il me venait les plus subtils mots… Si je trouvais, l’essence du beau, veillant sur ton sommeil, attendant ton réveil. Moi aussi, c’est à mon tour de lâcher prise. Je me laisse couler dans ce flux qui grise ma volonté d’espérer. A cueillir sur ton front, de ma bouche vermeil, des baisers vagabonds où nul sommeil ne pourrait m’endormir. Encore attentive à ton souffle qui respire et soupire. Là, nul besoin que tu ne te camouffles… Car ce que tu es, sans le savoir vraiment ; est pure innocence. Oui tant de beauté me perd superbement. Un dernier coup d’œil avant que tu ne te réveilles et je m’autorise à déposer sur tes lèvres offertes, cet éminent baiser où nos langues chercheuses me laissent amoureuse.

Alors l’océan largue son écume… C’est marée basse et mes vagues à l’âme ont le parfum de l’amertume ; le littoral de mes amalgames. Sous une apparente tranquillité, nos corps montent en température comme sous l’effet d’une fièvre en plein été où nous spiritualisons nos armures. Ainsi, peu à peu, nous laissons place à l’unité et à cette transe de la création où je capte tous ces petits détails qui nourriront mon écriture. Dans cet art qui, comme une élévation me porte vers les hauteurs de mes batailles. Contre et par moi-même, j’écoute mon profond désir de puiser dans ce que j’aime, cette quête esthétique qui me mène sur le chemin de la guérison. Dans cette grande passion, je sais que je fusionne avec le divin. La tête en ébullition, à l’injustice je fais mes adieux. Le cœur rempli de divinité, je me réveille intérieurement dans cet appel au partage que je te lance comme une bouteille à la mer. Là, l’énergie de la vie me prédispose à l’envie de contempler encore l’océan et d’écouter son chant. Certes nos cellules sont mortelles mais l’on peut se régénérer face à l’éternel. Serais-je capable de créer l’universel afin qu’éclate l’étincelle de ce que je suis et de ce que tu es ? Dis-moi si la vie est encore belle quand on a cinquante ans ?

Maintenant, nous sommes au restaurant et ce petit Chablis dont j’honore les effets étourdissants dans la minéralité de son breuvage. Je me plais à le déguster avec toi conjuguant notre liesse vers cette renaissance où l’on se réinvente comme dans une invitation au voyage. Le diner est d’une grande finesse comme toi mon amour et je me délecte de tous ces mets. Fine saint jacques en persillade, troublant caviar et roucoulade… jusqu’à ce que nous n’ayons plus faim. Le diner touche à sa fin et ignorant le covid pernicieux, j’embrasse bêtement ton masque de circonstance comme si rien ne pouvait m’atteindre, dans la puissance de mon amour pour toi.

Nous rejoignons notre tente où nous partageons une dernière cigarette, avides de la suite de cette nuit orageuse, délivrant sa pluie oblique qui berce nos élans. Alors nos corps qui se désirent profondément, tressaillent de mille frissons dans l’expectative de la jouissance. Quand je caresse ta peau jusqu’à l’aube sans repos dans l’intimité de cette extase où je prends ton sexe à pleine bouche. Là, totalement, tu m’apprivoises. Et je te serre contre mon cœur qui palpite de presque trop de vie, m’abandonnant à toi. Donne-moi un baiser délicat de ta langue pudique et curieuse qui me transporte dans une émotion tellement joyeuse. Je veux que les étoiles nous guident jusqu’à l’infini des possibles où se mélangent nos fluides. Dans la liberté de ce transport qui nous amène  du plus intérieur de nous-mêmes jusqu’au véritable partage, où je veux oublier la laideur du monde. La splendeur de notre intimité où la danse de la vie obéit à notre envie de s’illuminer d’amour. Ce soir, nos sexes ne s’emboiteront pas mais nos âmes fusionneront dans l’absolue délivrance de cette étreinte. Ensevelie par la puissance de ta force, je plaque mes seins contre ton torse et je jouis à l’acmé de mon plaisir jusqu’à étourdir mon coeur, saisie par une transe  où s’entremêlent l’essence de nos êtres ensembles et irrémédiablement séparés. C’est ainsi que je t’aime dans cette connexion mutuelle à notre beauté intérieure.