Part I

I

Je vis entre le jour et la nuit.

Je vis sans en récolter tous les fruits.

Pourtant je vis, pourtant je suis.

 

II

Je me suis retiré de ce monde des vivants.

Je suis entré dans le monde des dormants.

Deux mois, j’ai vécu sous terre.

 

III

J’ai vécu cinquante-neuf nuits en enfer ;

Sous les yeux d’un taciturne Cerbère,

Aux yeux noirs, sourdant de ses têtes tels des geysers.

 

IV

C’était un cauchemar, c’était une douleur aigüe,

Un supplice comme, jamais, personne n’avait connu !

C’étaient d’affreux rêves, c’étaient d’épouvantables nuits !,

 

V

Où j’étais seul, réfugié, au fond de mon lit,

Dans l’attente d’un départ qui se fit sous la pluie ;

Entre les gifles du vent, un océan en furie,

 

VI

Et un carré de terre transformé en rizière,

Par cette mer suspendue au-dessus de nos têtes.

J’ai longtemps ramé, j’ai espéré jusqu’hier ;

 

 

VII

Jusqu’à cet instant où j’ai vu une mouette

Traverser les nuages, le soleil sur son dos,

En criant qu’à présent il allait faire très beau !

 

VIII

A ce moment je gouttais, déjà, l’oisiveté

De mes vacances bien méritées,

Au bras de ma belle dulcinée ;

 

IX

Délicieuse enfant belle…oh oui, belle à croquer,

Comme une pomme…qu’il est hardi même d’examiner.

Elle est de ces êtres que l’on croit aimer un temps,

 

X

Et que l’on finit par chèrir longtemps.

– De ce lieu où je vis, je ne peux la toucher,

Dans ce lieu, je m’épuise ; mon cœur a suffoqué ;

 

XI

J’ai quitté ce merveilleux pays de ses bras,

Il y a déjà un bon mois.

J’en pleure ; le vide, le froid…ont envahi mes draps,

 

XII

Et cela dure depuis ce mois !

Loin de mes yeux, elle a disparu de mon cœur,

Mais loin de ses yeux, je replonge dans mes frayeurs !

 

 

XIII

Pourtant je résiste…en vain…,j’aurais dû prier…

M’en remettre aux cieux, vide, pour laver mon échec,

Passant, par ce biais, outre mes instincts de fennec !

 

XIV

…mais je me bats, encore, contre de stériles querelles ;

Pour que ne saignent plus les yeux de cette Belle.

Je suis lion ; l’homme indomptable, l’éternel rebelle !

 

XV

Un altruiste, un homme aux passions momifiées.

Il est des peines interminables,

Il existe des sanglots intarissables,

 

XVI

Qu’il faut, pourtant, se résigner à oublier ;

Pour ne pas perdre pied, au sein d’une réalité

Richissime en vie, qu’il ne faudrait pas quitter !