Petit extrait de l’Ombre de Marrakech

Bonjour,

Si vous l’espériez, cet extrait arrive au bon moment.

Si vous ne l’attendiez pas, c’est pas grave. C’est cadeau.

Voici donc un passage de l’ombre de Marrakech :

« La danse en rouge et or des flammes entraîne Médéric, qui ne bouge pas au fond d’un fauteuil au cuir souple. Par les carreaux, sans rideaux, il découvre des ombres qui pourraient inquiéter tout autre que lui. En tentant de replonger dans le livre d’un auteur à la mode, l’ancien commando repense constamment à la jeune rousse, à ses appréhensions, et surtout à sa disparition surprenante. Les éclats malicieux de la cheminée projettent un peu de jaune orangé et de rouge sur les murs.

Parfois, il regarde le petit cadre en bois brun-pourpre, veiné de noir, qu’il a acquis trois ans plus tôt dans la boutique d’un antiquaire. Médéric n’avait pas pu résister, acquérir ce portrait fascinant s’imposait.

Il l’a pris dans ses bagages et placé, le temps de son séjour, sur une bibliothèque Chauve-souris 1900 en noyer feuilles de cuivre et de nacre. Il représente une femme farouche, au port altier. Des larmes peintes en bleu coulent sur sa joue gauche, la droite porte la marque d’une griffe de la même teinte. Cette guerrière viking serre fermement une lance ouvragée, symbole de sa puissance ; ses mèches blêmes traversent sa chevelure noire qui se déploie sur une cape en peau de bête aux poils clairs ; sa peau a la couleur et le reflet des glaciers ; son regard celui des volcans quand s’échappe une coulée de lave ; une lueur insoutenable irradie le malheureux qui ose la fixer.

Si la mort a un visage, elle a celui de ce portrait. »

Alain MAUFINET