Je lis dans un article du jour et du Point : « L’Union européenne essaie de prendre sa revanche sur la paix en utilisant la guerre. Discutée, contestée, souvent rejetée, l’Europe avait un mérite : neutraliser les conflits. C’était d’ailleurs sa raison d’être. Depuis l’invasion de l’Ukraine, elle adopte une posture martiale : le refuge s’est transformé en caserne. Avions, chars, missiles : le champ lexical a été renouvelé. »
La seconde réflexion de son rédacteur est la suivante : La France est-elle prête à la guerre ?
Le journaliste en doute et sur le sujet, je le rejoins pleinement. Quand on connaît un tant soit peu l’histoire de notre pays, on pourra constater que la France n’a jamais été prête à la guerre. Ni militairement, ni politiquement, ni civilement.
Dans la suite de l’article, le journaliste du Point retrace justement l’historique des aléas de la France en guerre, depuis Iéna, sous Napoléon, jusqu’à Pétain et sa dictature. Ce qui est d’ailleurs, en point de chute de son raisonnement, pour moi, un rappel contextuel politique entre Macronie et Vichysme. Il conclut à moindres mots, et tout en finesse, avec cette banalité qui rassure le citoyen moyen et le lecteur non moins moyen : Qui veut la paix, prépare la guerre.
Cette blague dure depuis quelques millénaires.
C’est un classique.
De Napo à son fils Léon, d’Hitler à Jules césar, de Poulidor à Anquetil, du fromage au dessert : la blague perdure, auréolée de sagesse alors qu’elle relève de l’escroquerie la plus basse.
Donc, force nous est de conclure, après lecture de l’article du Point, que l’Europe, et donc la France, du moins ce qu’il en reste aujourd’hui, prépare la guerre ?
Pour obtenir la paix, alors ?
Après la pluie vient le beau temps, dit le poète de la chaîne météo.
Le journaliste du Point sous-entend aussi que l’Europe trouve une identité dans le conflit ukrainien. L’Europe passe progressivement d’arbitre à va-t’en guerre. C’est un nouveau statut. L’UE est, je le rappelle, justement créée à la base, pour éviter que les conflits entre nations du vieux continent ne dégénèrent. Je n’ai jamais lu dans sa constitution qu’elle pouvait avoir un rôle d’artificier.
Et il est vrai que sa position actuelle n’est pas claire.
D’un côté, elle fournit massivement à l’Ukraine logistique et armement contre la Russie, et de l’autre, elle nie déclarer la guerre à cette même Fédération de Russie…
Bizarre, vous avez dit bizarre ?
Comme c’est bizarre.
Sans être sympathisant communiste ni adepte de la philosophie slave, j’avoue qu’à la place d’un sujet russe lambda, je me poserai la question suivante : les Européens décadents de l’occident ne me prendraient-ils pas pour un con, Igor ?
Quand « monseigneur Poutine Premier », dans un discours-fleuve aux résonnances patriotiques staliniennes, a dit hier matin que « l’occident complote pour l’anéantissement de la Russie », on ne peut pas franchement lui donner tort…
Que l’on soit inscrit au PCF ou pas…
Si quelqu’un comprend quelque chose à cette situation, et surtout si quelqu’un comprend en quoi ce conflit est différend de celui de l’Afghanistan, de la Corée et du Viet Nam réunis, qu’il me l’écrive. Il n’y a que le terrain de jeu qui change.
La guerre des nations de 1914 à 1945, pour la première grosse tranche du conflit, avait pour base la finance. Beaucoup décrivent la grande bataille de 14-18 comme « la guerre des marchands de canons ». On retrouve d’ailleurs les mêmes familles industrielles et financières aux commandes dans la grosse bataille de 39-45.
Si concrètement nous prenons l’exemple de la France aujourd’hui, notons que selon nos médias nationaux « sérieux », et quelques organismes de mesures internationaux, notre pays a vendu pour plus de 1,6 milliard d’euros d’armes à l’Ukraine entre 2014 et 2020. Nous sommes, et cocorico au balcon, les troisièmes vendeurs d’armes au monde, derrières les USA et la Fédération de Russie. Si jusque là, les pays du Moyen-Orient et l’inde étaient nos principaux clients et représentaient 45 % de nos ventes d’armements, depuis 2020, l’Europe est notre principale cliente. En 2021, les commandes à l’exportation des entreprises françaises de défense ont atteint leur troisième plus haut niveau historique, soit 11,7 milliards d’euros, selon le rapport annuel du ministère des Armées (Source Statista). De là à dire que les trois cadors de l’armement s’affrontent pour bien plus qu’un grenier à blé…
Au-delà de l’aspect économique, je souligne qu’une vie humaine n’a pas d’argus, deux idéologies bien connues s’affrontent aujourd’hui, comme elles s’affrontent depuis 1917 et comme à l’époque, elles n’en tiennent pas compte.
Avec en toile de fond, phénomène nouveau, une Union européenne qui rêve et rêvera toujours, de devenir les États-Unis d’Europe. Europe dont les peuples concernés ne veulent pas, contrairement à leurs dirigeants et leurs énarques. Alors, il faut convaincre. Mais en attendant : une vodka-martini, moyennement séche, mélangée, et non remuée, Monsieur Bond ?
Yoann Laurent-Rouault