Confidences d’un écrivailleur.

Confidences d’un écrivailleur.

 

Je l’affiche, peu soucieux des affirmations habituelles. Mes romans n’ont pas d’âge, même s’ils sont le reflet d’une époque.

L’on dit qu’un roman ne vit qu’un an, voire deux. Pour moi, il n’en est rien.

L’on précise aussi qu’il faut rentrer dans une case : polar, new… je ne sais quoi ? Je suis donc désolé d’être inclassable. En fait je refuse de l’être.

Le roman, pour moi, est une tranche de vie réelle qui est parsemée par des lueurs d’espérances que les personnages peuvent ou non provoquer, voire saisir. L’existence n’a qu’un reflet, je tente de le peindre.

Je dénonce un peu, j’évite l’indignation, le jugement. Je décris souvent, je traduis le beau, le laid. Je témoigne tout en essayant de distraire. En empruntant la vie des autres, on voyage avec des êtres qui vous ressemblent.

Alors refusant de vêtir la robe du procureur, du bien-pensant, fuyant les chapelles des conservateurs et des contestataires, je vous propose quelques phrases du « chant des brisants ».

 

« – J’ai retrouvé par hasard, au creux d’une maquette de bateau, une note romantique. Cyrano de Bergerac, le début de la scène neuf, celle du baiser…

– Distrayant !

– Madame Stevens a plagié Edmond Rostand, en trahissant son secret : Un diamant qu’on met sur l’i du verbe aimer. Elle a écrit des vers identiques, en évoquant quelques poignées de pierres précieuses et un coffre mystérieux, non loin de lieux qu’ils ont bien connus. Elle voulait assurer un avenir de lumière à son amant…

Un petit rire accompagne l’observation. La réponse qui s’échappe laisse entrevoir des lèvres d’une étonnante rapacité.

– Mais encore…

Une ombre apparemment complice s’affaisse furtivement sur les deux acolytes. Les complots détestent la lumière. Les secrets aussi.

–Elle a reproduit le même numéro 56 sur des esquisses de dodo et de clefs de coffre. Nous avons le sésame. Notre gigolo de français doit ignorer ce legs, trop proche de la disparition de sa bienfaitrice. Nous l’avons aidé à partir vers la France, avec peu de choses. J’ai fait faire une enquête, il n’est jamais retourné à l’île Maurice. »

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Qui êtes-vous donc, vous qui avez l’audace de proposer vos écrits ?

Enfant solitaire, il apprécie les épopées que proposent les grands auteurs. Il voyage guidé par ces lectures, souvent accompagné par les auteurs romantiques. Se sentant à l’étroit entre la Garonne et les Pyrénées, il rêve d’équipées lointaines.

Le danger Soviétique se profile à l’Est. Il choisit d’être soldat, un soir de septembre 1969. Maréchal des logis-chef, il obtient rapidement ses galons d’officier. Il sillonnera pendant près de vingt ans les terres de l’Est de la France. Il s’entraine, il attend. C’est un peu, son désert des tartares. Il lit beaucoup.

Jeune, il était marqué par les pages du passé. Désormais, il se tourne vers les pages à écrire.

Il propose ses nouvelles pour des publications militaires, le mur de Berlin tombe. Le risque soviétique s’efface. Il l’avait écrit, mais son approche avait été jugé utopique dans le cadre de l’école de guerre. Ses nouvelles missions, à l’Etat-major des armées, l’entraine loin de la métropole, en particulier vers l’Afrique Francophone. Il y vit des aventures captivantes. Il partage des cultures et des mondes nouveaux, et noircit des pages d’écolier.

Il est nommé successivement chevalier de l’ordre national du mérite, puis chevalier de la légion d’honneur.

A l’aube de l’an 2000, Colonel, il quitte l’uniforme et change de vie. L’immobilier le capte. Il aime les mots de la vie réelle, il adore ceux de la fiction. Il décide d’écrire. Il imagine les secrets des hommes et des femmes qu’il croise. Il goute de les peindre. Quelques épais manuscrits remplissent maintenant sa giberne.

Amicalement

Alain MAUFINET