Les Atemporels : logique littéraire ou financière?

La collection « Les Atemporels » réunit des œuvres qui ne vieillissent pas, qui ont une date de publication mais pas de date de péremption. Car elles seront encore lues et relues dans un siècle. Ce sont des oeuvres du domaine public, préfacées par un auteur de la maison, et nous y insérons aussi désormais une bibliographie de l’auteur.

Les oeuvres du domaine public ont l’avantage d’être connues et éprouvées. Aussi, le marché est très concurrentiel. Beaucoup d’éditeurs très connus sont sur le créneau en France et ailleurs. Pour la France, citons Folio (3000 références) et Librio (500 références) qui sont les deux poids lourds du marché. Toutes deux font partie du groupe Madrigal (Gallimard).

Pourquoi et comment lutter contre de tels mastodontes de l’édition, qui peuvent par ailleurs tirer les prix vers le bas, puisque possédant toute la chaine du livre en intégration verticale (imprimeries, distribution, diffusion, librairies…)?

Est-ce une raison économique ou littéraire qui préside à nos choix?

La première raison c’est ni l’un ni l’autre. C’est une raison communautaire. Le fait que des auteurs de JDH préfacent ces livres donne une dimension littéraire forte aux auteurs en question, qui peuvent se targuer d’avoir préfacé de grands auteurs, qu’il s’agisse de Balzac, d’Orwell, de Gide, etc. Et cela permet aux auteurs de se faire réellement plaisir.

La deuxième raison est effectivement littéraire. Nous sommes amoureux de la littérature et pas seulement la littérature contemporaine. Nous marquons notre territoire avec cette collection, et nous faisons remarquer, ce qui, par ricochet fait remarquer l’ensemble de la maison.

La raison économique ne peut pas s’appréhender à court terme. En effet, les marges sont très faibles sur ces livres. Certes, il n’y a pas d’auteurs à payer (ou très peu, pour certaines préfaces), mais la marge, au final oscille entre 0.3€ et 1€ par livre! Soit 3 à 5 fois moins que sur un livre classique, et 10 fois moins que sur certains livres spécialisés. Cependant, ces oeuvres connues de tous offrent une récurrence qui ne se compte pas en mois mais en de longues années. Le lecteur ne verra pas la date de publication comme cela est le cas sur un livre de littérature contemporaine ou sur un livre pratique. Nous visons donc un effet de masse, d’abord pour amplifier les effets boomerang sur l’ensemble du catalogue, puis par addition de marges très faibles qui au final seront comme de nombreuses gouttes d’eau qui créeront une rivière. Pour cela il faudra avoir plusieurs centaines de titres au catalogue. Cela créera un fonds éditorial qui aura une valeur patrimoniale en raison du revenu récurrent.

Le souci est que tous ne se vendent pas de la même manière et que nous visons surtout désormais les titres peu concurrentiels mais néanmoins demandés. C’est là que réside par exemple le succès de notre best-seller « Psychologie des foules » de Gustave Le Bon. Sorti en aout 2019 ce livre s’est vendu à plus de 7.000 exemplaires à ce jour. Des livres de Balzac ou Victor Hugo publiés dans Les Atemporels ne se vendent presque pas, tant le marché est concurrentiel, avec de très nombreuses maisons sur le créneau sans parler des auto-édités. Par contre, sur un titre comme « Gamiani » de Musset, nous apparaissons en première position sur Amazon, mais celui-ci n’est pas très demandé. Nous en vendons une petite centaine par an. Amazon est la clé pour vendre ces livres, les libraires ne jurant que par Folio. Pour le moment… avec plusieurs centaines au catalogue, l’accueil sera surement différent. Cela viendra. Cela se construit.

Autre livre sorti en novembre sur lequel nous sommes très bien classés, mais avec peu de demande : « Propos d’OL Barenton, confiseur » de Auguste Detoeuf. Ou encore « Les chants de Maldoror » de Lautréamont. « Discours de la servitude volontaire » de La Boétie est aussi une valeur montante de la collection. Pourtant paru en mars, après des débuts timides, ses ventes croissent de semaine en semaine, car les fans d’Orwell le découvrent, vu que nous sommes sur le même thème, qui nous est cher, à savoir celui de la manipulation des populations par les pouvoirs despotiques.

Par contre, sur des traductions maison comme avec Orwell, les fans du maitre ont la curiosité de découvrir nos traductions qui du coup, se vendent à plusieurs centaines par an. Mais une traduction a un coût… C’est cependant une valeur sure.

Le livre sur lequel nous sommes excellents, c’est « Psychologie des foules ». Nous sommes très bons sur Orwell, La Boétie, et dominons un marché très restreint sur Gamiani et sur Detoeuf.

Nous venons de sortir 6 livres dont 5 qui viennent de tomber dans le domaine public (André Gide, René Guenon, Alain). Il faudra compter quelques mois pour qu’ils se fassent une place.

Nous avons l’intention d’aller plus loin dans les semaines et mois qui viennent, avec une nouvelle marque d’édition en plus des Atemporels. Ce dont nous reparlerons!

En attendant, vous qui cherchez des oeuvres du domaine classique améliorées par une préface complète, n’allez pas les acheter ailleurs que chez JDH !

Jean-David Haddad